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empereurs byzantins et de 14 miniatures des sultans ottomans (Saint-Pétersbourg, Institut des
Manuscrits Orientaux, C 358), un psautier de 32 miniatures (St-Pt, IMO, A 189), les icônes de
l’Hymne Acathiste, de la Vierge Hodigitria avec douze saints et de Saint Elian de Homs.
Cette analyse permettra de mettre en valeur le
talent de Youssef Al-Musawwer, souvent
sous-estimé : on avait tendance à considérer que son œuvre est un retentissement de l’art post-
byzantin crétois. Les miniatures de la chronique universelle révèlent le fait que ce peintre arabe sous
domination ottomane maîtrisait le code vestimentaire des empereurs byzantins. La représentation
des sultans ottomans montre que Youssef excellait dans une tradition
iconographique autre que la
sienne. Le peintre s’est inspiré des traditions iconographiques grecque et russe pour représenter les
saints stylites tout en demeurant fidèle aux sources textuelles. Les miniatures du Psautier montrent
sa solide connaissance du corpus iconographique vétérotestamentaire et son grand talent à
emprunter plusieurs schémas iconographiques pour composer de nouvelles iconographies. Youssef
interprétait délibérément quelques stances de l’Hymne Acathiste et incluait le prophète David après
la stance 12. Nous proposerons également une hypothèse pour la représentation équestre
de saint
Elian, un médecin et saint local, et nous identifierons les scènes narratives. La représentation de
saint Martin, de l’épi de blé dans la main de sainte Barbe et du prophète Jérémie dans l’icône de
l’Hodigitria fournissent des éléments sur l’identité du commanditaire de cette icône et mettent
en exergue l’influence de la tradition légendaire locale et de l’hagiographie occidentale sur l’art de
Youssef Al-Musawwer.
La diversité des thèmes iconographiques abordés par Youssef Al-Musawwer
nous fait pencher
pour une formation artistique à l’étranger : il est difficile de concevoir que Youssef Al-Musawwer
eut été initié sur place par un peintre « grec ». En outre, les différents styles adoptés dans ses icônes
et ses miniatures nous laissent supposer que Youssef était un iconographe itinérant, qui a profité de
ses séjours pour visiter maintes églises ornées de fresques et d’icônes. Les peintres grecs circulaient
souvent au Proche Orient, mais on envisage difficilement la possibilité de pouvoir acquérir sur
place une vaste culture iconographique identique à
celle de Youssef Al-Musawwer, d’autant plus
que les icônes melkites antérieures au XVII
e
siècle sont rarissimes. Mon analyse suggère également
la présence d’un atelier de peinture dirigé par Youssef Al-Musawwer : l’intervention de plusieurs
miniaturistes dans Ad-Durr Al-Manzoum et le Psautier appuie cette hypothèse.