Ferdinand Lot De l’Institut


De quelques écoles et de quelques maîtres. Gerbert, Abbon



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De quelques écoles et de quelques maîtres. Gerbert, Abbon. — Nous n’aurons à passer en revue qu’un petit nombre de centres de culture, ceux qui ont produit quelque œuvre digne d’être signalée.
Remy d’Auxerre, élève d’Heiric, adonné en particulier à la dialectique et à la musique, passe pour le meilleur écolâtre et le plus célèbre savant de la fin du IXe et du commencement du Xe siècle. Elevé à Auxerre, il ne semble pas y avoir professé. Appelé à Reims par l’archevêque Foulques, en 893, il passe à Paris en 900, après l’assassinat du prélat. Excellent professeur, il forma des élèves, dont quelques-uns obtinrent de hautes fonctions et qui lui ont fait une grande réputation. Son œuvre est avant tout faite de commentaires. Il commente les grammairiens latins, même Priscien, alors moins connu que les autres, et l’auteur de la division du savoir en sept « Arts », Martianus Capella. Il commente les classiques, Térence, Juvénal, les Disticha Catonis que l’on attribuait à Caton l’Ancien. Il commente le Carmen paschale de Sedulius, le De arte metrica de Bède le Vénérable. Il commente la Genèse, les Psaumes, peut-être les épîtres de saint Paul, les Opuscula sacra de Boèce ; quelques lettres et homélies complètent son bagage qui est celui d’un excellent écolâtre, plutôt que d’un écrivain.
Rappelons, à propos de l’école de Paris, le poème d’Abbon sur le siège de cette ville. Ses Bella Parisiacae urbis prolongeant le récit jusque vers la fin du règne du nouveau roi, Eudes, Abbon appartient à la période intermédiaire. Son troisième chant est en l’honneur de la Trinité, ce qui tend à faire croire qu’il écrit surtout pour l’école de Saint-Germain-des-Prés. On lui doit aussi des sermons « pour usage des simples prêtres » en style moins hérissé de difficultés que son poème épique. Cependant Paris à cette époque demeure un centre d’études secondaire.
Adson, instruit à Luxeuil, écolâtre à Toul, puis à Montiérender en Champagne, devient abbé de ce monastère (967), puis de Saint-Bénigne de Dijon en 990. Il meurt en route, en 992, dans un pèlerinage à Jérusalem. Son récit le plus curieux est un traité sur l’origine et l’époque de la venue de l’Antéchrist (De ortu et tempore Antichristi), composé à la demande de la reine de France Gerberge, femme de Louis IV et sœur d’Otton Ier, traité qui eut du succès et fut imité. On lui doit aussi des remaniements de vies des saints Frobert, Mansuy, Basle, Berchier (cette dernière inachevée).
Le monachisme du Xe siècle voit naître un établissement destiné à la célébrité, Cluny. Mais la culture scolaire n’est pas le but du fondateur. Le second abbé, Odon (927-942), est cultivé, mais il est allé s’instruire à Paris, auprès de Remy. On lui doit des Collationnes en trois livres, commentaire moral sur la Bible, qui est bien un des livres les plus ennuyeux qu’il soit possible de rencontrer, des Occupationes en vers, en sept livres. A la fin du siècle, Odilon (994-1049) écrit l’éloge de son prédécesseur, Mayeul (947-994), celui de l’impératrice Adelaïde, qui lui a été utile. Ces abbés seront eux-mêmes l’objet de biographies, Odon par Jean de Salerne, Mayeul par Syrus, Odilon par Jotsaud. On eût attendu plus et mieux.
Le centre d’études et de production le plus en vue est Reims. Flodoard, né à Epernay en 894, chanoine de l’église cathédrale, a laissé des Annales qui vont de 919 à 966. Elles sont copieuses, bien informées sans les partis pris haineux des annales rémoises du siècle précédent, rédigées par l’archevêque Hincmar. Elles s’arrêtent à 966, date de la mort de l’auteur. Nul ne l’imite, d’où l’incertitude de l’histoire de France pendant les temps qui suivront. Flodoart continue aussi le genre des histoires d’évêchés. Il écrit une Histoire de l’Eglise de Reims, poursuivie jusqu’à 948, précieuse par les pièces qu’il puise dans les archives de l’évêché, les lettres notamment qu’il analyse, et dont les originaux ont péri par la suite. On lui doit également un poème, en hexamètres, formant dix-neuf livres, sur les Triomphes du Christ, des saints en Palestine, à Antioche, en Italie. On a jugé l’œuvre « très inégale mais renfermant quelques beaux passages poétiques ».

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Gerbert. — Enfin l’école de Reims a eu pour écolâtre le docteur le plus illustre de ces temps après Alcuin, Gerbert, le futur pape Silvestre II. Né près d’Aurillac entre 940 et 945, Gerbert fait ses études à l’école dirigée par I’écolâtre Raimond du monastère de Saint-Géraud d’Aurillac. II y peut apprendre le trivium. Pour le quadrivium il a l’idée d’aller s’informer non dans la France du Nord, mais en Espagne, à Vich ; mais il est vrai qu’alors la Catalogne faisait partie du royaume de France. Vers 970, on le voit à Rome. Il y fait la rencontre de Géraud, archidiacre de Reims, que le roi Lothaire a chargé d’une mission. Gerbert se perfectionne en logique auprès de Géraud et lui apprend en échange l’Arithmétique et la Musique. Il gagne Reims en compagnie de Géraud et se voit confier l’école cathédrale de cette ville par l’archevêque Auberon (969-989). Possesseur des « Sept Arts », Gerbert est un des rares maîtres complets. Grâce à ce que nous apprend son disciple, Richer, nous connaissons non seulement le fond, mais la manière de son enseignement.
D’abord, il ne néglige pas le Quadrivium, au contraire. Le contenu est sans originalité. Il s’inspire simplement des résumés des traités antiques donnés par Boèce au VIe siècle. Il est faux que, en arithmétique, il doive quoi que ce soit aux Arabes d’Espagne. L’arithmétique nouvelle, dite « de position », découverte par Al-Kharismi, au milieu du Xe siècle, n’avait pas eu le temps de se répandre dans l’Espagne chrétienne au moment où Gerbert se rendit à Vich. Au reste, Al-Kharismi n’a été traduit en latin que vers 1130. Si quelques parties de 1’« Algorisme » se retrouvent dans certains manuscrits des œuvres mathématiques de Gerbert, c’est qu’elles y ont été insérées après coup, pour les compléter.
Ce qui est propre à Gerbert dans sa manière d’enseigner c’est son caractère concret, pratique. Pour exécuter des opérations arithmétiques compliquées, il construit une table à calculer, un abacus à 27 compartiments, au lieu des 13 usités. La machine sert pour les opérations d’arpentage désignées sous le nom pompeux de géométrie. En Musique, pour mesurer les proportions des sons, il use d’un monocorde. Peut-être a-t-il su construire un orgue, un de ces petits orgues portatifs du temps. Mais il est faux qu’il ait inventé l’horloge à roues.
Le fond de son enseignement philosophique est constitué par celles des œuvres d’Aristote et de Porphyre qui avaient été traduites en latin, car Gerbert ne sait pas le grec. De Platon, il connaît le seul Timée, traduit par Chalcidius. Il connaît le néo-platonisme, par le Pseudo-Denys et sans s’en douter, car, ainsi que tout le monde, il prend la Hiérarchie céleste, pour une œuvre purement chrétienne. En philosophie il ne se prononce pas pour tel système, il est éclectique. En morale aussi il est, et non sans bonheur, un conciliateur.
Dans l’argumentation, il s’attache à diviser les difficultés pour les mieux résoudre, comme il divise les genres en leurs espèces pour mieux établir ses subdivisions. Mais n’est-ce pas exagérer que de voir là un pressentiment de la méthode cartésienne ?
Grand professeur, Gerbert n’est en rien un innovateur. Ce qui le classe à part de son siècle, c’est qu’il est un humaniste au sens vrai du terme. Il est pénétré de culture antique. Il ne se contente pas des ouvrages à la portée de sa main. Il n’a assez de textes où abreuver sa soif de savoir. En Italie, il nous le dit lui-même, il s’est procuré des livres à grands frais ; il charge l’écolâtre de Bobbio de se mettre en quête de copistes qui feront des transcriptions pour son compte. L’écolâtre de Bobbio, de passage à Reims, est chargé de collationner un Pline, de transcrire le commentaire d’Eugraphius sur Térence, de faire copier des livres à Orbais et à Saint-Bâle Il apprend qu’un « César » se trouve en la bibliothèque de Montiérender. Vite que l’archevêque prie l’abbé Adson d’envoyer à Reims ce manuscrit pour qu’on le copie. Il propose à un correspondant de Barcelone l’achat d’une « Arithmétique ».
Rien là qui ressemble à une stérile manie de bibliophile. Ces livres, ce sont des instruments de culture antique. Combien de lettrés de son temps désireux de se former n’ont pu le faire parce qu’ils n’ont pu se procurer tel ou tel auteur ancien !
Grâce à cette incessante enquête Gerbert a su se constituer une bonne bibliothèque, fondement nécessaire de sa culture. La qualité de cette culture apparaît dans sa correspondance. Elle a la pureté du latin de la bonne période. Il possède l’art de composer, de mettre en relief l’objet de sa lettre, de trouver des expressions adéquates à sa pensée, de faire tenir l’essentiel en peu de mots. Ses lettres, justement admirées, sont le modèle du genre épistolaire, très supérieures à celles d’un Symmaque ou d’un Sidoine Apollinaire sous l’Empire romain finissant.
On doit aussi à Gerbert des traités de rhétorique, de mathématiques surtout. On a parlé plus haut de ses écrits politiques au concile de Saint-Bâle et de sa lettre à Wilderod de Strasbourg.
Haï de son clergé de Reims où ses intrigues ont réussi à lui conférer l’épiscopat, le maître quitte pour toujours la France en 997, se réfugie auprès d’Otton II qui le nomme archevêque de Ravenne, puis en fait un souverain pontife (février 999). La tête tournée par cet étonnant revirement de fortune, il prend le nom de Silvestre II, qui implique de dangereuses visées. Mais il meurt, peu après le jeune empereur, le 12 mai 1003.
Son savoir a nui longtemps à sa réputation. Il a paru tellement considérable que le monde clérical ne se l’est expliqué que par un pacte avec le Démon.

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Richer de Saint-Remy. — Un de ses disciples et admirateurs, Richer, moine à Saint-Remy de Reims, nous a laissé sous le titre Quatre livres d’histoire, un récit des événements qui se sont déroulés depuis le règne d’Eudes jusqu’à son temps (995). L’ouvrage n’a pas été répandu. On ne le connaissait que de nom. Aussi quand, en 1833, on retrouva à Bamber, où il avait échoué, on ne sait comment, le manuscrit même de l’auteur, on crut avoir fait une heureuse trouvaille. Il a fallu déchanter. Richer n’a vu dans l’histoire qu’un exercice scolaire. Quand il n’invente pas, il pille malhonnêtement Flodoard en lui prêtant des informations imaginaires. Même pour la période qui vit la fin des Carolingiens et l’avènement de Hugues Capet, il n’est pas sûr. Des épisodes, dramatiques sous sa plume, peuvent revêtir ce caractère par suite de la déformation que les faits subissent en passant de bouche en bouche, ou même être simplement des rumeurs qui ne sont fondées sur rien. Richer est le moins recommandable des « historiens » du haut Moyen Age.

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Abbon de Saint-Benoît. — L’école de la célèbre abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire (Floriacus) est illustrée par Abbon, d’abord son écolâtre, puis son abbé (968). Après avoir cherché à compléter son savoir à Reims, mais vainement, — Gerbert n’était pas encore là, — il semble qu’il se soit formé lui-même. Ce qu’il a de commun avec Gerbert c’est le goût du Quadrivium presque partout négligé. Il a écrit sur l’astronomie, le comput. En philosophie, il a étudié Boèce et écrit sur la Logique. Il a même une corde qui manque à Gerbert, le droit canonique ; il a donné un recueil de canons apprécié, adressé à Hugues Capet. Mais il n’a rien d’un humaniste. Il est l’auteur d’une suite de ces acrostiches compliquées, les carmina figurata, et les adresse à Dunstan qu’il a connu en Angleterre, dans une période de sa vie où il avait été écolâtre à Ramsey. Son Apologaeticus, suite de conseils de gouvernement pour Hugues Capet et son fils Robert, offre le même caractère de banalité que les traités sur les devoirs des rois de Smaragde, de Sedulius, d’Hincmar, au siècle précédent.
Abbon périt victime des moines de La Réole qu’il était allé réformer en 1004. Il laissait une grande renommée. Son élève, Fulbert de Chartres, l’appelle « le maître le plus fameux de toute la France ».

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Transmission du savoir au siècle suivant. — Gerbert et Abbon avaient laissé nombre d’élèves qui leur firent honneur en France et en Lotharingie, notamment dans l’épiscopat, sur le trône même : Robert II, fut à Reims élève de Gerbert.
Les Ecoles que ces disciples fondent ou régénèrent à l’exemple de leurs maîtres sont comme des embryons d’universités, mais d’universités n’ayant qu’un seul professeur, l’écolâtre. D’où longtemps leur fragilité. Si le maître disparaît ou s’éloigne ou s’il n’a pas un successeur renommé, le foyer s’éteint vite. Ce n’est que lorsqu’une continuité pourra s’établir qu’il y aura vraiment espoir de Studium generale, d’« université ». Or cette condition primordiale, la continuité, ne pourra se rencontrer qu’à Paris. Elle se produira parce que la dynastie nouvelle y établit sa capitale. Cet honneur, Paris l’avait eu sous Clovis et plusieurs de ses successeurs, mais l’avait perdu sous les Carolingiens. Paris le retrouve sous les Capétiens, après quelque hésitation des deux ou trois premiers de la dynastie aimant le séjour à Orléans et en Orléanais. Mais, au cours du XIe siècle, Paris confiné dans l’île depuis dix siècles, commence à déborder sur la rive droite. La corporation, la « hanse » des marchands de l’eau bâtit des maisons le long de la Seine, de Saint Gervais à Saint-Germain-l’Auxerrois, puis d’autres demeures le long des voies rurales qui, à travers un sol marécageux, mènent à l’abbaye de Saint-Denis et à l’abbaye de Saint-Martin-des-Champs. Un Paris nouveau naît, bien plus riche que l’ancien. Un autre Paris naîtra plus tard, au siècle suivant : les clos de vignes et les champs de blé de la Montagne Sainte-Geneviève cèdent la place aux hôtels où logent les étudiants (escholiers) qui ne trouvent plus place dans la Cité ou sur le Petit-Pont unissant le Parvis Notre-Dame à la route des pèlerins se dirigeant sur Saint-Jacques de Compostelle (rue Saint-Jacques).
Au XIIe siècle Paris est devenu vraiment une grande ville, grande pour l’époque. C’est là que, de plus en plus, les parents et les protecteurs voudront que les enfants et adolescents fassent leurs études. L’espoir du succès et d’un gagne-pain y attirera les maîtres ou les aspirants à la maîtrise de tous côtés, de tous pays. Si bien que Paris, qui figure à peine au nombre des bonnes « écoles » de la période carolingienne, devient rapidement, à partir du XIIe siècle, le centre intellectuel de l’Europe.

Apparition de la langue française –
Littérature en langue vulgaire

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Pendant de longs siècles le latin tel qu’on le parlait sous le Haut Empire, devenu une langue artificielle, momifiée, a seul été jugé digne d’être employé quand on écrivait. A peine si, çà et là, des fautes involontaires nous révèlent que le latin parlé, la véritable langue, différait de plus en plus du latin conventionnel dont on usait la plume à la main. Au IXe siècle seulement on ose reproduire, comme on peut, des textes en langue parlée. Et l’on s’aperçoit que le latin parlé est très éloigné du latin qu’on peut qualifier de « classique ». C’est déjà sinon du « français », du moins quelque chose qui annonce le « français », quelque chose qui en est plus proche que du latin.
En disant « français », nous simplifions considérablement un phénomène très complexe. Il n’y a pas « un français », mais une multitude de « français ». Le latin parlé abandonné à lui-même, sans un centre de ralliement, s’est diversifié en une multitude de dialectes dans tous les pays où Rome avait substitué sa langue à celle des indigènes, en Italie, dans les îles (Sicile, Sardaigne, Corse), en Espagne, en Gaule, en Pannonie et Dacie. Il n’en pouvait être autrement. Si les représentants de l’Etat et les classes riches circulaient, non sans difficultés, d’un bout à l’autre de l’Empire, il n’en était pas de même de l’immense majorité des populations romanisées. Or, c’est un fait, comme d’ordre physique, que tout langage confiné en un coin du sol, sans communications aisées et continues avec le même langage parlé en d’autres points, évolue selon des lois propres. D’où des divergences de plus en plus accentuées entre parlers issus de la même origine. Le parler vulgaire provincial finit même par exercer de l’influence sur la langue châtiée des classes supérieures. En Afrique romaine, l’empereur Septime Sévère avait de 1’« accent », comme nous dirions. Un autre grand Africain, honneur des lettres latines, saint Augustin, quoique professeur de rhétorique, donc puriste de profession, ne prononçait pas tout à fait comme un Romain de Rome ou de Milan. Saint Jérôme disait qu’il y avait « vingt latinités ». Il était certainement très modéré dans cette supputation. Et c’est précisément cette variété dans le langage parlé qui eût obligé d’user, dans les textes officiels et les écrits de tout ordre, de la langue du passé, même si le prestige des grands modèles n’y avait incité les esprits. En effet, laquelle des latinités parlées eût-on pu adopter ?
Il va sans dire que lorsque l’Empire se fût dissous en Occident, la tendance au particularisme ne fit que s’accentuer dans le langage comme dans les autres manifestations de la vie. Un voile épais nous cache les étapes de l’évolution du latin parlé en Gaule entre le Ve et le IXe siècle. Les rois mérovingiens et carolingiens savaient quelque chose de la langue parlée des « Romains », leurs sujets, mais leur idiome national était pour les premiers le bas-allemand, ancêtre du flamand, pour les seconds le « moyen allemand » usité en Austrasie. La cour royale ne pouvait donc être un centre de « langue romaine » parlée capable de devenir un dialecte officiel s’imposant aux autres parlers. La chose n’eût peut-être pas été impossible, vers le Xe siècle, si la dynastie carolingienne avait prolongé son existence. Mais en ce cas, le français, le « bon français », eût été le dialecte qui devint le picard, car ces souverains résidaient dans la vallée de l’Aisne, sur le cours moyen et supérieur de l’Oise et aussi sur la Somme.
Nous ne pouvons savoir, faute de textes, à quel stade de différenciation se trouvaient les divers parlers romains de la Gaule au IXe siècle. La seule chose sûre c’est que les parlers en Aquitaine, en Septimanie, en Provence, en Lyonnais, différaient déjà considérablement de ceux de la « France » du Nord. Le fossé entre le « français » du Nord, sous tous ses aspects, et le soi-disant « provençal » est déjà profondément creusé.
Le plus ancien texte « français » qui nous soit parvenu est représenté par les fameux serments échangés à Strasbourg le 14 février 842 entre les deux plus jeunes fils de Louis le Pieux, Charles et Louis, et leurs armées. C’est comme par miracle que nous avons conservé ce texte dans les Historiae de Nithard, qui fut présent. Jusqu’alors les serments échangés entre princes nous sont transmis sous une forme latine, quelle qu’ait été la langue en laquelle ils furent en fait prononcés. Si Nithard a commis l’unique infidélité à cet usage, c’est sans doute par précaution, pour qu’il demeurât un témoignage irrécusable de ce qui s’était passé. Au reste, il est bien possible que ce soit lui qui ait rédigé le texte de ces serments. Petit-fils de Charlemagne, cousin des deux jeunes rois, il parlait à la fois le franc rhénan et le dialecte romain du Nord. Et puis, Nithard, qui est un laïque, éprouve-t-il moins de répugnance qu’un clerc à salir sa plume en transcrivant des paroles prononcées en langue vulgaire. La tâche de Nithard n’était pas aisée. La langue vulgaire possédait des sons que le latin ignorait. Comment les transcrire ? Et puis l’habitude d’écrire uniquement en latin poussait inconsciemment à mettre un mot latin là où il eût fallu un mot vulgaire. C’est ainsi que dès le premier mot des serments on lit pro, alors que l’on prononçait por en réalité.
Ce n’est pas tout. En quel dialecte les serments ont-ils été prononcés ? Pour plus de sûreté, c’est le souverain des parties germaniques, Louis, qui a pris l’engagement en langue romaine vulgaire et c’est le souverain des parties « romaines », Charles, qui a pris l’engagement en langue tudesque. Sous quel aspect pouvait se présenter le romain vulgaire pour Louis ? Ce ne pouvait être que celui qu’il avait entendu en son enfance, à la cour de son père, c’est-à-dire celui de l’ancêtre du picardo-wallon ou du lorrain. Pour l’engagement de l’armée de Charles le problème est difficile, comme désespéré : cette armée, numériquement très faible, est composée de dévoués de toutes les régions, ouest, nord de l’Aquitaine, nord de la Bourgogne. Les seuls qui fassent défaut sont les gens d’entre Seine et Meuse, qui précisément comprendraient le mieux le dialecte dont vient d’user, dans notre hypothèse, le roi Louis. La solution la plus probable c’est que les serments représentent une langue composite, conventionnelle, où les particularités dialectales trop accusées ont été écartées pour que l’ensemble de l’armée de Charles comprît l’engagement de Louis et ses propres engagements. On voit que le premier « monument de la langue française » n’en donne qu’un aperçu insuffisant, même énigmatique.
Les premiers textes littéraires, si l’on peut dire, sont la cantilène ou séquence de sainte Eulalie, composée dans le Nord à la fin du IXe siècle, la Vie de saint Léger et la Passion du Christ, tous deux en octosyllabes, du siècle suivant. Il y faut ajouter, pour le dialecte central ou méridional, le Boèce (en décasyllabes).
Si nous laissons de côté ce dernier comme « provençal », nous constatons que nous sommes fort éloignés du latin. La séquence présente des particularités qui ne persisteront pas, ainsi la diphtongaison de o bref en uo (buona), l’emploi du plus-que-parfait (avret) pour l’imparfait, le comparatif bellezour (bellitiora), etc. Néanmoins, dans l’ensemble, cela sent le français. De même, et plus encore, la Vie de saint Léger et la Passion du Christ. Le maintien du d entre voyelles, prononcé sans doute un peu comme le th doux anglais, conserve quelque chose d’archaïque à la langue qui, cependant, nous donne une impression de français, de « vieux français ».
Il va sans dire que si l’on a daigné sacrifier un peu de parchemin à écrire ces textes en langue vulgaire, c’est dans une intention pieuse, nullement pour « faire de la littérature ». La population a cessé d’entendre depuis longtemps le latin, même le latin liturgique. Il importe de l’édifier, quoique à regret, dans la langue qu’elle comprend. Les conciles de l’année 813 avaient autorisé le clergé à prononcer le sermon en langue vulgaire. Soyons certains que les prêtres n’avaient pas attendu la permission, tant en pays romain qu’en pays germanique. La tendance à user de la langue comprise du peuple pour l’instruire et l’édifier était irrésistible, inévitable, salutaire.
L’emploi du vers était de rigueur dans les idées de l’époque et des temps suivants jusqu’à la fin du Moyen Age et même au delà. Ce vers c’est le décasyllabe.
« C’est un vers de dix syllabes comptées, s’allongeant à volonté, soit à la fin, soit à la césure fixe, d’une syllabe atone dont on ne tient pas compte dans la mesure. Il comporte deux accents obligatoires, sur la quatrième et la dixième syllabe, tous deux suivis d’une coupe métrique qu’un arrêt du sens vient marquer d’une manière plus ou moins nette, et un nombre variable d’accents mobiles. Le mouvement rythmique est en général ascendant, mais il se trouve parfois interrompu par la substitution du trochée (syllabe accentuée plus atone) à l’iambe accentué en tête du vers après la césure. Le nombre de dix syllabes comptées est observé rigoureusement dès les premiers temps (IXe, Xe siècles) et le poète se permet des élisions, des hiatus et des contractions pour maintenir dans toute son intégrité cet élément stable de la métrique 1. »
Dans le Boèce, une syllabe surnuméraire mais atone est permise après la césure, dans le Saint Alexis et le Roland (XIe siècle), une autre à la fin du vers. La rime, ou plutôt l’assonance, est de rigueur, mais, tandis que dans le Sainte Eulalie (et le Saint Léger), l’assonance porte sur deux vers consécutifs, dans le Saint Alexis, dans le Roland et les autres chansons de geste, l’assonance se poursuit au gré du poète sur un nombre illimité de vers, constituant des « laisses » de longueur très variable.
Quelle est l’origine de ce vers d’allure essentiellement épique ? On a voulu la trouver dans le vers quantitatif, ainsi le trimètre iambique scazon. C’est un pur non-sens, le vers rythmique assonancé étant l’opposé du vers métrique, le blanc ne sort pas du noir ou le noir du blanc. Le vers rythmique d’Eglise ne peut, lui non plus, être retenu, car nous avons vu qu’il est au plus haut point artificiel, puisqu’il fait entrer en ligne de compte des syllabes disparues de la prononciation et va jusqu’à leur conférer un accent. Le décasyllabe n’a pu naître que lorsque les voyelles finales, les antétoniques, les intertoniques avaient cessé d’être prononcées, donc vers le VIIIe siècle approximativement.
Ces observations nous amènent à parler d’un problème passionnant.La période carolingienne n’a-t-elle pas vu l’aube au moins de l’épopée française ?
Jusqu’au début de ce siècle, le problème ne se posait même pas. On admettait comme chose prouvée que la Chanson de Roland telle que nous la connaissons reposait sur un poème antérieur disparu relatant l’événement de 778 où le « préfet de la marche de Bretagne » trouva la mort dans un défilé des Pyrénées. De même la Chanson de Guillaume rappelait la lutte des marquis de Septimanie contre les Arabes, sur l’Orbieu, en 793, Gormond et Isembart la victoire de Louis III sur les Normands à Saucourt en 881, Girard de Roussillon, les luttes du comte de Vienne contre Charles le Chauve, Raoul de Cambrai, un épisode du milieu du Xe siècle où Raoul de Gouy engagea un combat où il succomba contre les fils d’Herbert de Vermandois. Ogier le Danois aurait pour prototype Othgarius, partisan des fils de Carloman, frère de Charlemagne, qu’il combattit en 774, etc. Quelques-uns même voulaient remonter jusqu’à l’époque mérovingienne. Le héros d’un roman en vers du XIIIe siècle, Floovent, ne porte-t-il pas un nom dérivé de Chlodowing, c’est-à-dire descendant de Clovis.
On ne s’expliquait pas très clairement, d’ailleurs, sur l’étendue et la nature de ces compositions « malheureusement perdues ». Qu’elles eussent été plus brèves que les chansons de gestes conservées des XIIe et XIIIe siècles d’un nombre de vers accablant, la chose allait de soi. Un indice était que la Chanson de Roland, la plus archaïque, croyait-on, ne comporte que quatre mille vers. La Chanson de Guillaume sous sa forme la plus ancienne n’en a que deux mille. De Gormond et Isambart nous n’avons qu’un long fragment, mais l’ensemble ne pouvait être démesuré. N’est-ce pas encore trop long ? Né sous le coup de l’émotion, défaite ou victoire, le noyau primitif ne pouvait dépasser les dimensions d’une complainte à laquelle les savants modernes donnaient le nom de « cantilène ». Quant aux bévues historiques de nos chansons de geste on les expliquait comme le produit de « contaminations ». Les héros porteurs de mêmes noms foisonnent. Les rois Louis, les rois Charles s’amalgament. Tous les Louis, Louis Ier, II, III, IV, V sont identifiés à Louis le Pieux, tous les Charles sont pris pour Charlemagne, tous les Guillaume, et ils sont innombrables du VIIIe au Xe siècle, s’identifient au héros de 793, Guillaume au Courb-nés (nez courbe, devenu par erreur Court-nez). Fatalement les temps, comme les personnages, se confondent. L’archevêque Turpin est Tilpin de Reims qui n’a que faire avec Roland. Ganelon est la déformation de Wenilon, archevêque de Sens, qui trahit Charles le Chauve. Des apports et enjolivements accentuent le caractère dramatique de la chanson. On invente Olivier, la belle Aude, cent autres personnages. La chanson de geste qui se donne pour de l’histoire tombe dans la biographie romancée. Elle repose cependant sur un noyau historique incontestable.
Ce système on plutôt ces systèmes, car ces vues comportent des nuances qu’on ne peut indiquer dans ce rapide exposé, a un avantage : il tourne cette pierre d’achoppement, la création d’un genre littéraire nouveau.
Les récits épiques que les Celtes, comme les autres Barbares, avaient connus, avaient disparu avec la langue celtique. Les Romains ne connaissaient pas l’épopée populaire, car l’Enéide, la Pharsale sont des fabrications de lettrés sans attache populaire. Les Germains, au contraire, possédaient une poésie épique. Nous en avons maint témoignage. Charlemagne avait ordonné, Eginhard nous en est garant, — de

« transcrire pour que le souvenir ne s’en perdit pas, les très antiques poèmes barbares où étaient chantées l’histoire et les guerres des rois d’autrefois ».


Le hasard nous a même conservé un fragment, contemporain de l’empereur, du poème Hildebrand et Hadubrand où est raconté en beau style épique le combat d’un père et d’un fils qui ne se reconnaissent pas. Si l’épopée des Nibelungen ne nous est parvenue que sous la forme profondément altérée d’un long poème composé en Autriche au début du XIIIe siècle, le fonds est bien antérieur. Le Beowulf anglo-saxon est contemporain des Carolingiens.
Quand les Francs établis à l’ouest de la Meuse perdirent l’usage du germanique pour prendre celui de la langue « romaine », ils ne perdirent pas pour autant le goût des récits épiques. Ils les transposèrent dans ce latin vulgaire qui devenait le « français » et ils prirent pour héros les souverains et guerriers leurs contemporains carolingiens. Il n’y a donc pas génération spontanée, mais continuité. Cette théorie explique en même temps que les régions où les Francs ne se sont pas ou peu établis, l’Aquitaine, la Provence n’ont pas eu de chansons de geste autochtones et se sont bornées à goûter celles du nord de la Gaule.
Cette théorie, qui avait le mérite de la cohérence, a été bousculée, il y a déjà quarante ans, par Joseph Bédier qui n’en a voulu rien retenir 1. Il établit tout d’abord que les quelques allusions à l’existence de chants épiques qu’on avait cru trouver à l’époque carolingienne, ont été faussement interprétées. En réalité, silence absolu. Pour lui nul besoin d’une transmission orale, poétique ou non, pour expliquer le résidu historique infime noyé au milieu d’aventures de pure imagination. Il suffit qu’un religieux ou un simple serviteur d’église fasse connaître un épisode biographique au jongleur auteur de la chanson de geste pour qu’il lui serve de support historique ou pseudo-historique. Joseph Bédier a établi, en outre, que l’immense majorité de nos chansons de geste ont été chantées sur les voies de pèlerinage conduisant à Saint-Jacques de Compostelle. En s’arrêtant avec les pèlerins aux sanctuaires qui jalonnaient cette voie, les auteurs de nos chansons ont appris l’existence et quelque peu de choses de la vie des héros qui y étaient vénérés.C’est ainsi, pour ne prendre qu’un exemple entre beaucoup, que Guillaume a été connu parce qu’il était honoré à Saint-Julien de Brioude, surtout à Gellone, abbaye fondée par lui, où il se retira et mourut en odeur de sainteté. Nos légendes épiques, toutes celles qui sont parvenues à nous, le sont sous une forme qui n’est pas antérieure au XIIe siècle, tout au plus à la fin du XIe. Elles nous dépeignent sous des noms antiques les gens et la société de cette époque. Nul intermédiaire ne les relie à de prétendus ancêtres et prototypes de l’époque carolingienne. Entre cette période et celle qui vit l’apparition des premières chansons de geste existe un gouffre que rien n’autorise à combler.
Nous sommes donc en présence d’un cas littéraire de génération spontanée. Pour l’expliquer l’auteur invoque ce renouveau en toutes choses que manifeste le XIe siècle. L’esprit des croisades, sinon les croisades elles-mêmes, suffit à expliquer certains aspects de ces poèmes, celui naturellement d’une lutte implacable contre l’Infidèle, le Sarrasin. Un autre aspect, la révolte du grand vassal contre le souverain, répond on ne peut mieux à l’état de choses qui se manifeste sous les premiers Capétiens.
Il est difficile de résister à une critique aussi serrée, impitoyable aux hypothèses nébuleuses, aux rapprochements fallacieux, critique servie par une langue qui unit harmonieusement le charme littéraire à la rigueur scientifique.
Peut-on dire cependant que l’auteur des Légendes épiques ait partie gagnée ? S’il a établi d’une façon définitive que quantité de nos chansons ont passé par des sanctuaires, le long de voies conduisant à Saint-Jacques de Compostelle ou à Rome et ont subi l’influence des histoires qu’on y racontait sur les grands personnages qui étaient enterrés dans ces sanctuaires ou en avaient été les bienfaiteurs, nul sanctuaire, nulle voie de pèlerinage n’apparaissent dans la Chanson de Roland, dans la Chanson de Guillaume archaïque, retrouvée récemment, et ce sont les plus anciennes.
Enfin le gouffre que Bédier creuse entre les chansons que nous connaissons et l’ère carolingienne, n’est qu’un fossé que l’on peut combler sans trop de peine. Hariulf, moine de Saint-Riquier, entendait chanter chaque jour de Gormont et Isambart par les gens de Ponthieu, en 1088. Une Chanson de Roland, peut-être quelque peu différente de celle que nous lisons, existait dès 1060 pour le moins. Un manuscrit conservé à La Haye renferme le fragment d’une mise en latin d’un texte où se retrouvaient les noms de plusieurs personnages du cycle des Narbonnais. Or ce manuscrit ne saurait être écrit plus tard que le milieu du XIe siècle et le fragment est la mise en prose, devoir d’écolier, d’un texte latin versifié antérieur, inspiré par un poème en langue vulgaire. Nous sommes bien près de la fin de l’ère carolingienne, si même nous n’y pénétrons pas déjà. Comment ne pas être frappés aussi par ce fait que Raoul de Cambrai repose, malgré tout, sur un événement, un fait divers, de la fin des temps carolingiens, de l’année 943 !
Les chansons de geste représentent un des aspects de ce renouvellement de toutes choses qu’accusent le XIe et encore plus le XIIe siècle. Soit ! Mais pourquoi leurs auteurs ne chantent-ils pas les exploits accomplis de leur temps en Angleterre, en Espagne, en Italie, en Orient ? Qu’ont-ils besoin de ressusciter des personnages qui dorment sous terre depuis deux ou trois siècles, et sur lesquels l’inévitable oubli aurait fait son œuvre ! Que ne chantent-ils Guillaume le Conquérant, Robert Guiscard, Roger, conquérants de l’Italie du Sud, les seigneurs français, aquitains, bourguignons qui passent les Pyrénées pour aider les Castillans à refouler les Maures, que ne chantent-ils plutôt Godefroy de Bouillon, ses émules, ses successeurs ! Leurs exploits, voilà de beaux sujets épiques, plus beaux que ceux que célèbrent nos chansons de geste.
On dit ces légendes épiques inspirées de l’esprit des croisades. Et précisément, c’est la croisade, la vraie, celle qui va délivrer de l’Infidèle le pays où a vécu le Christ qui est le fait historique le plus étranger à ces poèmes. A cela rien d’étonnant. L’« esprit de la croisade » n’existe pas avant 1095. Il ne semble même pas que le projet de l’entreprise armée jetant la chrétienté contre l’islam en Orient se fût déjà formé dans l’esprit du pape Urbain II quand il quitta l’Italie pour présider le concile de Clermont. Et à cette date, la Chanson de Roland et la Chanson de Guillaume, d’autres encore sans doute, existaient déjà.
Enfin la période envisagée pour la naissance par génération spontanée des légendes épiques (fin XIe-XIIe siècles) marque-t-elle un renouveau tel qu’il contraste avec l’atonie de la fin de la période carolingienne ?
Dans la vie politique, rien de tel : la monarchie capétienne repose sur les mêmes principes que la monarchie carolingienne. La vie économique marque un progrès plus accusé, mais non un bouleversement, du moins pendant le XIe siècle. La littérature en latin et ses genres continuent la période antérieure. Pour les arts, grâce à des travaux récents, nous savons que l’art dit « roman » n’est que l’épanouissement des efforts tentés en tous sens pendant l’époque carolingienne.
Pourquoi n’en serait-il pas de même pour la littérature profane ? Pourquoi, par une exception unique, la littérature des XIe, XIIe siècles serait-elle la seule manifestation qui ne se relierait pas au passé carolingien ?
Mais on doit reconnaître que cette littérature épique des temps carolingiens que nous pressentons, nous ne pouvons sans témérité tenter d’en reconstituer l’aspect. Etait-ce un chant lyrico-épique, né sous l’impression des circonstances ou déjà une « chanson de geste » véritable, si succincte fût-elle ? Ou encore le poème naissait-il à distance de l’événement en s’inspirant de traditions orales ? On en peut discuter indéfiniment et sans réel profit.
De même il serait très vain de chercher ce que pouvaient être les chants lyriques, les poèmes d’amour ou de deuil que possédait notre époque, puisque même les populations les plus sauvages les connaissent. On peut seulement être assuré que, en dansant la « carole », les femmes chantaient des chansons lyriques ou lyrico-épiques.
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