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praitôr d’Hellade, Eumathios Philokalès, doux de Chypre, le protostratôr Michel Doukas, Georges
Paléologue, le sébaste Jean Comnène et enfin l’empereur lui-même et toute sa famille à deux reprises.
Le but de la présente communication est de tenter d’interpréter les rapports entre le saint et la
politique de donation de ces aristocrates, pour tenter de comprendre ce que sous-entend ce document
hagiographique. Il semble, en effet, que la Vie de Cyrille reflète plus un désir d’idéal monastique
propre à la politique de Manuel I
er
Comnène que les pratiques du temps de son grand-père. L’auteur
de la Vie, Nicolas Kastaképénos, est lié au monastère de Katasképénè, fondé par l’empereur ; or, le
chroniqueur Nicétas Chôniatès mentionne clairement que cette fondation doit uniquement vivre de
donations impériales en numéraire, sans doute dans le but de limiter le pouvoir et la puissance des
grands aristocrates, a contrario de la majorité des fondations aristocratiques de l’époque de Cyrille.
Le saint refuse en effet les donations de terres de ces hauts personnages, comme celle de Constantin
Choirosphaktès. En revanche, Cyrille accepte de la part d’Alexis Comnène un chrysobulle impérial
et surtout six livres d’or. Lors d’une famine, le saint distribue aux pauvres toute cette donation,
ainsi que le fruit du travail des moines, alors qu’immédiatement après, Georges Paléologue apparaît
au monastère de Philéa et offre miraculeusement une bourse remplie d’or à la communauté. Ces
épisodes mettant en scène l’importance des dons de numéraires aux moines face à l’inanité d’un
don de terre renforcent le lien entre la Vie de Cyrille le Philéote, le monastère de Kastasképénè et
la politique de Manuel Comnène. Ce texte pourrait donc être une œuvre de communication d’un
moine de la Katasképénè, rattachant un saint au fonctionnement de son monastère et renforçant la
politique impériale en reconstruisant les rapports du saint et de l’aristocratie.
D’autres indications viennent renforcer cette idée. Tout d’abord, tous les hauts personnages
présents dans la vie le sont aussi dans l’Alexiade d’Anne Comnène, qui aurait pu servir d’inspiration
pour l’hagiographe. Il n’existe en réalité qu’une seule rupture fondamentale entre les deux textes, le
portrait d’Eumathios Philokalès, adulé chez Anne Comnène, détesté par Cyrille le Philéote, qu’il
faut sans doute mettre en relation avec le conflit ayant opposé le futur patriarche de Constantinople
Nicolas Mouzalôn au doux de Chypre, connu par le long poème de résignation du siège de Chypre
du prélat, ce qui interrogerait aussi sur les rapports entre la Katasképénè et le siège patriarcal. En
somme, il nous semble que la Vie de Cyrille le Philéote, ne permet sans doute pas d’analyser les
rapports entre la haute aristocratie et le monachisme sous Alexis I
er
, mais donne sans doute une
bonne image de ce qu’aurait dû être l’attitude de ces personnages vis-à-vis du monachisme pour
l’empereur Manuel Comnène.
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