1883
8e Chapitre général
[1] Nous avons vu que le regretté défunt avait convoqué un Chapitre général par sa circulaire du 26 xbre, pour l'élection ou la réélection des Frères Assistants, selon les Constitutions approuvées par le Saint-Siège. Il n'avait pas même soupçonné qu'il convoquait lui-même ceux qui allaient être forcés de lui donner un successeur: "L'homme propose et Dieu dispose."
[2] Le C.F. Théophane, Vicaire, fixa l'ouverture dudit Chapitre au 22 avril, présida la retraite de trois jours devant présider l'élection d'un nouveau Général et appuya ses instructions sur la nécessité de faire un bon choix. On put même remarquer certaines expressions tendant adroitement à écarter les suffrages de sa personne.
[3] Néanmoins, il fut élu au premier tour. Lorsqu'on l'eut intronisé, il dit à haute voix: "Bourgeois de Bourges qu'avez-vous fait?" Par son humilité, le nouveau Révérend faisait allusion au blason de la ville de Bourges où l'on voit un âne assis dans un fauteuil. Son élection se fit le 25 et celle de ses Assistants le 26.
[4] Les Capitulants adressèrent ensuite une lettre collective à tous les Frères. En voici le commencement:
[5] "Nos Très Chers Frères, Il y a trois ans, en pareille circonstance, le Chapitre général annonçait à la Congrégation l'heureuse élection du successeur du R.F. Louis-Marie dans le généralat de l'Institut. Nous espérions alors que le nouvel élu, l'excellent F. Nestor resterait longtemps à la tête de la Congrégation. Ses talents et ses vertus répondaient aux besoins des temps présents. Comme une lampe ardente et luisante, selon l'expression de nos saints Livres, il réchauffait et éclairait ceux qu'il avait mission de diriger.
[6] Tous, sous un tel guide, nous poursuivions avec confiance l'oeuvre de zèle qui nous est confiée. Peut-être même comptions-nous trop sur les moyens humains! Le bon Dieu qui doit avoir seul l'honneur de ses oeuvres, n'a-t-il pas voulu nous en faire ressouvenir en rappelant prématurément à lui notre nouveau Supérieur? Ce zélé et fidèle serviteur de Dieu, après avoir, à l'imitation de notre divin Maître, passé les trois dernières années de sa vie à faire le bien comme Supérieur, s'est endormi saintement dans le Seigneur.
[7] Mais la Providence divine ne nous a pas laissé longtemps orphelins. Le Chapitre général, convoqué par la circulaire de notre très regretté défunt et par une lettre particulière du C.F. Vicaire, en date du 14 avri 1883, a d'abord procédé, conformément aux Constitutions, à l'élection du Supérieur, puis à celle de ses Assistants. Ces élections ont eu lieu le 25 et le 26 de ce mois.
[8] Les votes du Chapitre se sont portés sur le C.F. Théophane, 1er Assistant et, à ce titre, associé depuis 23 ans à l'administration de l'Institut. Ses éminentes vertus et sa longue expérience des affaires, la direction sage et éclairée qu'il a constamment donnée à ses Frères, le désignaient à nos suffrages. Aussi son élection a-t-elle été accueillie avec une vive satisfaction à la maison-mère, comme par chacun de nous.
[9] Les élections des Frères Assistants n'ont pas été moins heureuses, ni moins bien accueillies que celle du R.F. Supérieur. Elles nous donnent pour Assistants: F. Philogone, F. Euthyme, F. Procope, F. Norbert, F. Gérald, F. Bérillus, F. Adon, F. Stratonique.
[10] Comme vous le voyez, ces Frères vous sont bien connus. Les 6 premiers étaient déjà en exercice et les 2 nouveaux dirigeaient des maisons importantes, l'un, notre maison provinciale de Saint-Paul-3-Châteaux, l'autre, le pensionnat de Valbenoîte [à] Saint-Etienne.
[11] Toutes ces élections se sont faites avec un grand esprit de foi et un religieux recueillement. On n'en a sera pas étonnés lorsqu'on se rappellera qu'elles avaient été préparées: 1— par les ferventes prières que vous avez adressées au ciel pendant 3 mois et par une retraite de 3 jours, faite par les Capitulants immédiatement avant ces élections;
2— par une bénédiction spéciale du Saint-Père qu'a daigné nous envoyer de Rome S.E. le cardinal Howard, Protecteur de notre Congrégation..."
[12] Parmi les Assistants, les 6 réélus gardèrent les mêmes fonctions. Le nouveau Révérend confia la Province de Saint-Genis au C.F. Adon et celle de l'Hermitage pour lui succéder, au C.F. Stratonique.
Recours au Saint-Siège
[13] Après avoir constaté cette nouvelle organisation, nous nous proposions de clore notre récit. Un fait et une prétention nous décident à esquisser à grands traits ce qui s'est passé depuis la susdite organisation jusqu'au 31 mai 1891. Voici le fait:
[14] A la demande des Capitulants, le C.F. Euthyme avait dû parler du voyage de Rome, de la découverte de la dénonciation et de la grande peine qu'en avait ressenti le Révérend défunt. Ce récit indigna la presque totalité des Capitulants lesquels demandèrent à rédiger une énergique protestation, à la signer et à l'expédier à Rome.
[15] Rédigée par eux, en dehors du Régime, il fut décidé que cette protestation serait signée librement et dans une sorte de huis clos. Quatre capitulants n'y apposèrent point leur signature et se désignèrent ainsi eux-mêmes comme étant les auteurs de la malheureuse dénonciation.
[16] Voici la prétention:
Au début du Chapitre, l'un des 4, parlant de l'un des 3 autres, avait dit à plusieurs capitulants: "Si vous eussiez nommé un tel Assistant, il y a 10 ans, vous ne seriez pas embarrassés aujourd'hui, comme vous devez l'être pour élire un nouveau Général!..."
[17] Et voici maintenant la rapide esquisse par laquelle nous allons prouver que les 4 opposants se trompaient grossièrement et que le bon Dieu n'a besoin ni de l'habileté humaine, ni de tel ou tel homme pour faire son oeuvre258.
On a pu s'apercevoir que F. Avit parle assez peu de la Province de La Bégude. Comme il n'a pas mentionné le transfert de la maison provinciale de La Bégude, il n'est pas superflus d'ajouter ici un long extrait de ces annales d'Aubenas qui décrivent cet important événement.
[18] La maison de La Bégude était devenue trois fois insuffisante et les Frères y souffraient le martyre, surtout pendant les retraites durant lesquelles ils étaient entassés les uns sur les autres, le jour et la nuit. Déjà en mille huit cent soixante-trois, M. l'aumônier Benoît avait exposé pathétiquement cette situation au R.F. et il l'avait supplié d'y aviser.
[19] Le Révérend y avisa en effet et, le 7 mai 1866, en l'étude de Me Marze, notaire à Aubenas, il fit, représenté par le C.F. Procureur général, les trois acquisitions suivantes au nom de l'Institut pour lequel il se porta fort personnellement.
[20] Des sieurs Philippe-Xavier Rey-Herme et Isidore Vouland, agissant au nom de son épouse Constance-Marie Rey, une propriété en champs plantés de mûriers, arbres à fruits et vigne et en un petit bâtiment situés au quartier de Bois-Vignal, sur la commune d'Aubenas, d'une contenance d'environ 37 ares moyennant le prix de 6.000 fr. exigible le 15 juin 1872 avec l'intérêt à 5%.
[21] Du sieur Louis Roure, par l'intermédiaire du C.F. Malachie, une propriété joignant la première consistant en jardins, vigne, bois châtaigners et prairie où se trouvait un bâtiment d'une contenance de 120 ares, moyennant 15.000 fr., payable par annuité de 5.000 fr. chacune: la première le 15 juin 1868 avec l'intérêt légal.
[22] Le 21 octobre 1868, en la même étude, du sieur Eugène Durand, juge de paix à Aubenas, une propriété joignant les deux premières, mais traversée par la route nationale, d'environ deux hectares au prix total de 20.000 fr., payable dans 5 ans avec l'intérêt à 5%.
[23] Un décret impérial autorisa les deux premières acquisitions le 10 juillet 1867. Il n'y a pas eu de décret approuvant l'acquisition Durand.
[24] Ces achats étant faits, on eut sans doute mis la main à l'oeuvre sans trop tarder pour la construction de la maison provinciale, selon les plans et devis que le C.F. Assistant préparait depuis plusieurs années, mais la guerre intervint, retarda forcément cette construction et prolongea ainsi les souffrances des Frères à La Bégude.
Les annales donnent ensuite, comme habituellement, le nombre des Frères qui ont pris l'habit à l'issue des retraites qui se sont encore faites à La Bégude, les listes des Frères qui ont prononcé des voeux, de ceux qui sont morts durant ces années-là et des nouveaux établissements. Elles continuent ensuite par la description de la ville d'Aubenas avant de revenir à la maison.
[25] Les Frères du Bienheureux de La Salle dirigeaient l'école communale [d'Aubenas]. Il n'a tenu qu'à nos supérieurs d'en avoir la direction. En effet, le conseil municipal avait voté trois fois le remplacement des Frères du Bienheureux de La Salle par les nôtres, en 1866, en 1873 et en 1877. Il basait ses votes:
1— sur la proximité de notre maison provinciale;
2— sur ce fait que les anciens Frères de Viviers, plus tard affiliés à notre Institut, avaient été institués par le Département;
3— sur les 2.000 fr. que le Conseil général allouait chaque année au noviciat de La Bégude.
[26] Nos supérieurs n'avaient accepté le remplacement proposé qu'à la condition expresse que le T.H.F. Supérieur général des Frères des Ecoles Chrétiennes y consentirait librement. Le F. Jules, alors directeur de notre pensionnat de Paris, reçut tous les renseignements par écrit avec l'ordre de traiter la question avec le T.H.F. Irlide. Il y mit plus de zèle et de suffisance que de prudence et de convenance, ce qui fit échouer la chose.
[27] Nous n'avons pas à expliquer pourquoi et comment l'école des Frères du Bienheureux de La Salle, à Aubenas, fut ensuite laïcisée.
[28] Nous avons déjà relaté l'acquisition des terrains sur lesquels la vaste et belle maison provinciale est assise. Ces terrains ont une contenance de 3 hectares, 57 ares et ont coûté 41.000 fr. Constatons de nouveau que la maison fut construite sur les plans et devis préparés de longue main par le C.F. Philogone lequel en a minitieusement surveillé l'exécution, après avoir prévu les moindres détails et établi toutes les commodités, dans lesdits plans et devis. Cette belle construction a coûté la somme totale de 320.000 fr. Nous ne comprenons pas dans ce chiffre les clôtures, les travaux considérables de terrassement et autres exécutés par les Frères eux-mêmes et qui n'auraient pas coûtés moins que 100.000 à 120.000 fr.
[29] Le 16 mai 1876, avec l'autorisation de Mgr. Delcusy, M. l'abbé Eldin, chanoine honoraire et curé-archiprêtre d'Aubenas, avait bénit la première pierre de la maison provinciale d'Aubenas... Cette pierre avait été placée sous le jambage droit de la porte de la chapelle définitive laquelle n'est pas encore construite. On y avait placé une boîte renfermant des fragments de plusieurs églises de Rome, diverses médailles et l'état sommaire de l'Institut à cette date.
[30] ... Enfin, le 29 dudit [septembre] 1878, fête de l'archange Saint Michel et des saints anges, Mgr. Bonnet, évêque de Viviers, bénit solennellement la nouvelle maison provinciale sous le vocable de l'Immaculée Conception.
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