1873
En Nouvelle-Calédonie
[1] Au mois de janvier, M. le ministre de la Marine demandait 4 de nos Frères pour aller moraliser les déportés en Nouvelle-Calédonie et il proposa les conditions que le gouvernement faisait aux Frères de Ploërmel en d'autres lieux. Le Révérend s'empressa de promettre les Frères demandés aux conditions faites aux Frères de M. de Lamennais mais il demanda quelques mois pour préparer des sujets capables.
[2] Quelque temps après, il envoya les noms des Frères Louis-Antonio, Henricus, Théobald et Félix, au ministre, ajoutant qu'ils faisaient leurs préparatifs et qu'ils iraient s'embarquer à Toulon dès qu'on leur ferait signe. Il exprimait le désir qu'il y eût un aumônier à bord.
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[3] A la fondation de la maison de Rives, la Grande-Chartreuse avait promis 500 fr. par an à M. le curé. S'apercevant ensuite que cette somme n'allait pas toute aux Frères elle l'avait supprimée. Le 18 avril le Révérend pria le R.P. Abbé de la continuer et de l'adresser directement aux Frères qui ne pouvaient s'en passer, ce qui fut fait au grand déplaisir de M. le curé.
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[4] Les 4 Frères susnommés partirent de Brest le 5 mai, sur le Calvados, avec une obédience du R. Frère pour Nouméa. Les 501,15 fr. pour frais de voyage de Saint-Genis à Brest, 1150 kg de bagages compris, furent remboursés. Il va sans dire que toutes les dépenses du voyage furent aux frais de l'Etat. Le traitement de chaque Frère était fixé à 1.700 fr., plus la portion journalière de viande. Ce n'était que l'équivalent d'un traitement d'environ 700 fr. en France.
[5] Le R.P. Vitte, ayant été sacré évêque à Verdelais au mois de mai, pour la Nouvelle-Calédonie, le Révérend s'empressa de lui écrire pour lui offrir ses hommages et le prier d'honorer la maison-mère d'une visite. Celle-ci eut lieu quelques jours après.
Circulaires du 25-01 et 24-05-1873
[6] La 1re circulaire de 1873, datée du 25 janvier, contenait:
1 — Des instructions pour remplir les formalités relatives au nouvel engagement décennal;
2 — Une invitation aux Frères directeurs à faire des efforts pour aider à solder les dettes de l'Institut et notamment à rembourser un emprunt de 300.000 fr. devant avoir lieu 2 ans après;
3 — La nécessité de multiplier les locations et l'avis que 4 Frères venaient de partir pour la Nouvelle-Calédonie;
4 — La demande de prières pour les Frères Vial et Ange qui se rendaient aussi en Océanie;
5 — La demande d'une messe, 3 mercredis de jeûne et d'abstinence et, pendant un an, après le Salve Regina du matin de la récitation des six invocations au Sacré-Coeur de Jésus, au Coeur Immaculé de Marie, à Saint Joseph, aux Anges gardiens, aux saints et saintes de Dieu et pour les défunts, dans chaque maison, en action de grâces pour la loi militaire de 1872 exemptant nos sujets comme membres de l'Institut, à la seule condition de l'engagement décennal.
[7] Le Révérend entrait dans des détails infinis sur ces 5 points, selon sa coutume.
[8] Le 24 mai une seconde circulaire complétait les considérations sur la vie et les vertus du C.F. Jean-Baptiste présenté aux Frères comme le type de la vocation fervente. Elle entrait dans de grands détails.
[9] Elle annonçait ensuite le départ des Frères Nectaire, Loetus et Anselme, le 5 juillet pour le Cap, ajoutant que les Frères de cette ville avaient une centaine d'enfants protestants dans leurs classes. Ceux de Sydney avaient 350 élèves.
[10] Le Révérend ordonnait des élections selon nos Constitutions, pour le Chapitre général qui devait avoir lieu et il donnait les noms de tous les stables, seuls éligibles.
[11] Enfin, il fixait l'ouverture des diverses retraites, comme les années précédentes. Celle des membres de l'Administration générale était indiquée pour avant ou après la tenue du Chapitre lequel fut ouvert le 11 août.
Chapitre général
[12] Il se composait des Frères Avit, Louis-Bernardin, Nicet, Abel, Marie-Jubin, Marie-Lin, Cittinus, Ethelbert, Marie-Clarent, pour Saint-Genis-Laval; Azarias, Callinique, Chrysogone, Claude, Juste, Cyrion, Epaphras, pour l'Hermitage; Nestor, Onésiphore, Jean-Marie, Ildefonse, Ladislas, Donat, Cariton, Palémon, pour Saint-Paul-3-Châteaux; Malachie, Ambroise, Juvénal, Louis-Régis, pour Aubenas; Aidant, Andronic, Aquilas, Gébuin, Norbert, pour le Nord, l'Ouest et les Missions.
[13] Le Chapitre renouvela les mandats du C.F. Théophane, pour la Province du Nord, du C.F. Philogone, pour celle de La Bégude, du C.F. Euthyme pour celle de l'Hermitage et du C.F. Félicité, pour celle de Saint-Génis. Il élut le C.F. Nestor, Visiteur de la Province de Saint-Paul, pour remplacer le C.F. Eubert comme Assistant de la même Province et le C.F. Procope qui n'était point membre du Chapitre, comme Assistant de la Province des Iles Britanniques, Océaniennes et du Sud de l'Afrique.
[14] Ce Frère avait exercé à Glascow depuis une vingtaine d'années et savait parfaitement la langue anglaise, indispensable à l'Assistant de la nouvelle Province.
[15] Après les élections, le Chapitre vota par acclamation une bannière à N.-D. de Lourdes et députa le C.F. Eubert pour la porter dans ce nouveau sanctuaire. Il prit ensuite diverses mesures de détail dans l'intérêt de la discipline et de chacun des Frères. Il chargea le Régime de s'entendre avec les Frères directeurs pour préparer une nouvelle offrande à N.S.P. le Pape.
[16] La 1e session de ce chapitre fut close le 15 août par une consécration de ses membres et de tout l'Institut au S.C. de Jésus et au Coeur Immaculé de Marie.
Affaires internes et externes
[17] A son retour de Lourdes, le C.F. Eubert fut nommé Secrétaire général à la place du F. Juste. Celui-ci en fut tellement contrarié qu'il se mit au lit et y resta pendant 6 ans, après lesquels on le décida à se lever à peu près chaque jour, mais il resta à l'infirmerie et y reste encore.
[18] Le Révérend fit une petite circulaire pour engager les Frères directeurs à porter dans les maisons provinciales, en se rendant aux retraites, tous les objets de vestiaire hors de service, y compris les vieux souliers et les vieux chapeaux, attendu que l'on tirait un bon parti de ces objets dans lesdites maisons.
[19] Le 26 juillet il adressa une petite circulaire à chacun des Frères appelés à la stabilité. "Vous êtes dignes d'émettre ce voeu, leur disait-il, parce que vous avez bien gardé les trois voeux de votre profession, que vous avez bien observé et fait observer la Règle et que votre bon esprit a édifié vos confrères."
[20] Les adversaires de notre cimetière revenant toujours à la charge, le R. Frère alla voir M. le Préfet, en fut bien accueilli et lui exposa les raisons qu'avait la maison-mère pour tenir à ce cimetière. Il lui écrivit le 29 octobre pour le remercier du bon accueil qu'il en avait reçu et de l'espoir qu'il lui avait donné de régler enfin cette question.
[21] Mgr. Robert, évêque de Constantine et d'Hippone, ayant demandé de nos Frères pour Bône et Philippeville, le R. Frère lui répondit qu'il regrettait vivement de ne pouvoir être agréable à un prélat dont nous n'avions eu qu'à nous féliciter pendant 17 ans de Vicariat général à Viviers.
Les dettes à rembourser
[22] Le C.F. Norbert ayant été nommé Visiteur pour Saint-Paul à la place du C.F.Nestor élu Assistant, le Révérend lui envoya un exemplaire de la circulaire qu'il avait adressé aux Frères du Nord, pour en obtenir les fonds nécessaires au payement des 325.000 fr. dont 100.000 au Crédit foncier et le reste à Breteuil, à Beaucamps, à Lille, à Dumfries, à Lyon, lesquels devaient être soldés par la Province du Nord. Il lui parlait aussi des quêtes projetées dans divers diocèses, avec la permission des Ordinaires, pour divers besoins des Provinces du Centre.
[23] En quittant la direction de la maison de Paris, le C.F. Norbert devait en visiter plusieurs dans le Nord pour appuyer cette demande de fonds, avant de commencer ses visites dans le Midi. La question financière fut l'une des grandes préoccupations du R. Frère Louis-Marie pendant tout son généralat.
[24] Les demandes de fondations nouvelles, la plupart appuyées par les évêques, allaient en se multipliant et arrivaient de tous les points de France, même de l'étranger.
L'orgue de la maison-mère
[25] Ayant trouvé un petit orgue, bien incomplet, au prix de 2.000 fr., les Frères de l'Hermitage l'avaient acheté et fait placer dans leur chapelle. Recevant ensuite la visite du R. Frère, ils crurent l'honorer beaucoup en lui faisant ouir les sons vibrants de cet instrument.
[26] Ils furent vite détrompés. Le Révérend ne leur laissa pas deviner qu'il était mécontent de les voir, malgré le défaut de leurs ressources, prendre le pas sur la maison-mère. De retour à Saint-Genis, il témoigna aussi son mécontentement sans détour au C.F. Euthyme, alors Assistant de l'Hermitage et lui dit de s'occuper des mesures à prendre pour procurer un orgue convenable à la chapelle du chef-lieu de l'Institut. Le C.F. fit une quête dans les écoles et parmi les Frères. Nous ajoutâmes 300 fr. aux 1.000 que nous avions déjà donnés pour les constructions. Il s'entendit avec M. Merklin de Lyon pour l'orgue de 20 jeux, à raison de 1000 fr. le jeu, qui augmente nos solennités depuis 1873.
[27] Sa robe monumentale, fabriquée 15 ans plus tard dans la maison sous la direction de notre habile F. Hilaire, a au moins doublé son prix, sans parler des 150 fr. annuellement payés au même facteur qui fait accorder l'instrument deux fois par an.
Liturgie lyonnaise
[28] La 1re retraite fut prêchée par le P. Balmon, cadet, et la 2e par le P. Beaujeu. Mgr. Vitte présida la clôture de celle-ci.
[29] Le 1er dimanche de l'avent de cette année 1873, la belle et antique liturgie lyonnaise fut remplacée dans notre chapelle par la liturgie romaine. Sans vouloir rien blâmer, et tout en nous rappelant le proverbe: "Des goûts et des couleurs on ne discute pas", nous nous permettons de remarquer que la solennité de nos fêtes ne gagna rien à ce changement.
[30] La liturgie et les cérémonies lyonnaises étaient plus variées, moins monotones que la liturgie et les cérémonies romaines lesquelles ont écarté nos magnifiques proses et un certain nombre de nos belles hymnes.
Nouveaux engagements
[31] Trois prises d'habit à la maison-mère, 3 à l'Hermitage, 3 à Beaucamps, 2 à La Bégude, 2 à Saint-Paul, 2 à Hautefort et 2 à Sydney, nouveau noviciat, enlevèrent les habits du monde à 276 postulants et en firent autant de novices. C'était une riche moisson, mais il s'y trouvait, comme toujours, de nombreux épis vides.
[32] Après les diverses retraites, les novices dont les noms vont suivre firent profession: les Frères Bède, Lawrence, Anecte, Antoninus, Berthold, Chrystotèle, Dioscoride, Dioscorus, Emmanuel, Ferréol, Gordien, Joseph-Sébastien, Louis-Abel, Marie-Ethelvode, Marie-Félix, Marie-Lambert, Marie-Zacharie, Morand, Pélage, Pierre-Damien, Tiburce, Arèce, Cryspule, Florence, Fidentien, Marie-Adalbert, Williams, Angilbert, Aquilin, Argimir, Benoît-d'Aniane, Athanasius, Bernardus, Classique, Claude-Marien, Cypriano, Damascène, Damasus, Datus, Attalus, Elphège, Emilius, Eraste, Herman, Léonide, Mantius, Marie-Bernard, Jean-Baptiste, Muscien, Parfait, Pulchronius, Ursin, Zéphirin, Adelphus, Lanfranus, Marcello, Marie-Cyprien, Pierre-Chrysostôme, Présidius, Quinibert, Révocat, Sergio, Théodorus, Valfrid, Victus, Albéric, Ansevin, Angélique, Amaranthe, Bénilde, Biblis, Congall, Dieudonné, Fidentius, Jordan, Justinien, Léovigilde, Maron, Marie-Rodriguez, Miroclès, Philange, Prudentius, Renobert, Respice, Théodone, Titus, Urbase et Jean-Césaire.
[33] Celui-ci était le neveu du défunt F. Césaire dont nous avons parlé.
[34] Le F. Jean-Baptiste dont le nom figure parmi ces nouveaux profès, était le neveu du regretté défunt qui laissait ce nom libre. Après la mort de son oncle, il obtint d'échanger le nom patronymique qu'il avait auparavant avec celui de Jean-Baptiste.
[35] Il n'y avait point eu de stable depuis 1869. Aussi y en eut-il une grosse fournée en 1873: les Frères Anien, Charles, Junien, Marie-Junien, Dosithée, Eudoxe, Marie-Sébastien, Marie-Stanislas, Xavier, Chrystophe, futur provincial, Jean-Baptiste de Saint-Paul, Louis-Gonzague, Xénophon, futur Visiteur, Cécilius, futur Provincial, Marie-Xavier, Alphonsis, Gérald, futur Assistant, Clovis et Procope, futur Assistant.
[36] Le F. Eudoxe se mit ensuite dans un mauvais cas et dut quitter l'Institut. Après avoir erré ça et là, il entra à la Trappe de Chambaran où il est encore. C'était un sujet capable, intelligent et musicien, mais il le savait trop. Fils d'une simple blanchisseuse, il avait eu la manie de vouloir se faire passer pour noble dans les différents postes qu'il avait occupé. Aussi un confrère caustique, F. Staton qui ne persévéra pas non plus, l'avait-il surnommé le marquis de la Galoche.
Nos défunts
[37] Comme si la mort s'était repentie de nous avoir pris le C.F. Jean-Baptiste en 1872, elle ne nous enleva que 17 victimes en 1873. Le nombre des défunts fut donc diminué d'environ la moitié sur les années précédentes. Voici les noms des 17 défunts: Bongarçon, postulant; les Frères Andéol, Marcolinus, Marie-Bertrand et Saturnin, novices; Pierre-Auguste, et Ernest, obéissants; Damiano, Aule, Patience, Joseph-Marie-Xavier, Léopold, Fridien et Lucien, profès; Gaétan, Pierre-Marie et Juvénal, stables.
[38] F. Juvénal avait exercé les fonctions de Visiteur dans la Province d'Aubenas pendant plusieurs années. C'était un religieux sérieux, mais simple, sans bruit et sans prétentions. Il n'aimait pas rencontrer des irrégularités dans les diverses maisons qu'il avait à voir, non plus que dans celles qu'il avait dirigées.
[39] Le F. Pierre-Marie avait fait un peu de latin avant d'entrer dans l'Institut. C'était un sujet dévoué, pieux, régulier, mais d'une capacité ordinaire. Premier directeur de l'établissement de Saint-Genest-Malifaux, il avait cru faire merveille en conduisant ses élèves par douzaine au noviciat. Presque tous avaient ensuite manqué de courage et une dizaine à la fois scandalisaient leurs compatriotes cinq ans après, par leurs propos et leur conduite déréglée. Nous avons vu que ce Frère fut envoyé ensuite en Océanie. Sa santé n'ayant pu s'y faire, il avait dû rentrer en France et s'y rendre utile selon la mesure de ses forces morales et physiques.
Nouvelles fondations
[40] Bien que l'impéritie du Maréchal Mac-Mahon eût empêché la restauration de la monarchie et que le radicalisme commençat à poindre, l'Institut fonda encore 16 maisons en 1873: La Guerche, Montchanin, Tuileries, Beurrières, Saint-Just-de-Baffie, Clelles, Foissiat, Chaponost, Saint-Genis-L'Argentière, La Belle-de-Mai, Allan, Puget-Ville, Bussières, Létrat, Saint-Maurice-sur-Loire, Nouméa et Dumfries (pensionnat).
[41] Les postes de Montchanin, de Clelles, de Saint-Genis-L'Argentière, de Bussières, de Saint-Just-de-Baffie et de Beurrières ne purent faire le bien longtemps: la société de Tuileries s'étant dissoute à Montchanin, le local étant trop insuffisant à Clelles, les bases peu solides à Saint-Genis-L'Argentière et à Saint-Just-de-Baffie.
[42] Quand à Beurrières dont la Procure générale avait payé la moitié de l'installation c'est-à-dire 1500 fr. qu'elle n'a pas recouvrés, le maire fit laïciser l'école pour se venger du curé. Celui-ci aurait parfaitement pu supporter les frais d'une école libre, mais on ne lui avait pas appris à conjuguer le verbe donner.
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