Édition numérique établie par Danielle Girard et Yvan Leclerc



Download 1,94 Mb.
Pdf ko'rish
bet53/116
Sana20.06.2022
Hajmi1,94 Mb.
#686119
1   ...   49   50   51   52   53   54   55   56   ...   116
Bog'liq
Madame Bovary version el

ça pique

Emma ne répondit rien. Il poursuivit


Et vous voilà sortie de bien bonne heure


Oui, dit-elle en balbutiant ; je viens de chez la 
nourrice où est mon enfant.

Ah ! fort bien ! fort bien 
! Quant à moi, tel que 
vous me 
voyez, dès la pointe du jour je suis là
; mais 
le temps est si crassineux, qu'à moins d'avoir la 
plume juste au bout... 

Bonsoir, monsieur Binet, interrompit-elle en lui 
tournant les talons. 

Serviteur, madame, reprit-il d'un ton sec. 
Et il rentra dans son tonneau. 
Emma se repentit d'avoir quitté si brusquement le 
percepteur. Sans doute, il allait faire des conjectures 
défavorables. L'histoire de la nourrice était la pire 
excuse, tout le monde sachant bien à Yonville que la 
petite Bovary, depuis un an, ét
ait revenue chez ses 
parents. D'ailleurs, personne n'habitait aux 
environs 
; ce chemin ne conduisait qu'à la 
Huchette 
; Binet donc avait deviné d'où elle venait, 
et il ne se tairait pas, il bavarderait, c'était certain

Elle resta jusqu'au soir à se tortu
rer l'esprit dans 
tous les projets de mensonges imaginables, et ayant 
sans cesse devant les yeux cet imbécile à 
carnassière.
Charles, après le dîner, la voyant soucieuse, 
voulut, par distraction, la conduire chez le 
pharmacien 
; et la première personne qu'
elle 


aperçut dans la pharmacie, ce fut encore lui, le 
percepteur 
! Il était debout devant le comptoir, 
éclairé par la lumière du bocal rouge, et il disait


Donnez-moi, je vous prie, une demi-once de 
vitriol. 

Justin, cria l'apothicaire, apporte-nous l'acide 
sulfurique. 
Puis, à Emma, qui voulait monter dans 
l'appartement de madame Homais : 

Non, restez, ce n'est pas la peine, elle va 
descendre. Chauffez-
vous au poêle en attendant... 
Excusez-moi... Bonjour, docteur (car le pharmacien 
se plaisait beaucoup 
à prononcer ce mot
docteur

comme si en l'adressant à un autre, il eût fait rejaillir 
sur lui-
même quelque chose de la pompe qu'il y 
trouvait)... Mais prends garde de renverser les 
mortiers 
! va plutôt chercher les chaises de la petite 
salle ; tu sais bie
n qu'on ne dérange pas les fauteuils 
du salon. 
Et, pour remettre en place son fauteuil, Homais se 
précipitait hors du comptoir, quand Binet lui 
demanda une demi-once d'acide de sucre. 

Acide de sucre ? fit le pharmacien 
dédaigneusement. Je ne connais pas,
j'ignore ! Vous 
voulez peut-
être de l'acide oxalique
? C'est oxalique, 
n'est-il pas vrai ? 
Binet expliqua qu'il avait besoin d'un mordant 
pour composer lui-
même une eau de cuivre avec 
quoi dérouiller diverses garnitures de chasse. Emma 
tressaillit. Le pha
rmacien se mit à dire


En effet, le temps n'est pas propice, à cause de 
l'humidité.



Cependant, reprit le percepteur d'un air finaud, 
il y a des personnes qui s'en arrangent. 
Elle étouffait.

Donnez-moi encore... 

Il ne s'en ira donc jamais ! pensait-elle. 

Une demi-
once d'arcanson et de térébenthine, 
quatre onces de cire jaune, et trois demi-onces de 
noir animal, s'il vous plaît, pour nettoyer les cuirs 
vernis de mon équipement.
L'apothicaire commençait à tailler de la cire, 
quand madame Homais parut avec Irma dans ses 
bras, Napoléon à ses côtés et Athalie qui la suivait. 
Elle alla s'asseoir sur le banc de velours contre la 
fenêtre, et le gamin s'accroupit sur un tabouret, 
tandis que sa sœur aînée rôdait autour de la boîte à 
jujube, près de 
son petit papa. Celui-ci emplissait 
des entonnoirs et bouchait des flacons, il collait des 
étiquettes, il confectionnait des paquets. On se 
taisait autour de lui ; et l'on entendait seulement de 
temps à autre tinter les poids dans les balances, 
avec quelques paroles basses du pharmacien 
donnant des conseils à son élève.

Comment va votre jeune personne ? demanda 
tout à coup madame Homais.

Silence 
! exclama son mari, qui écrivait des 
chiffres sur le cahier de brouillons. 

Pourquoi ne l'avez-vous pas amen
ée
? reprit-
elle à demi
-voix. 

Chut ! chut 
! fit Emma en désignant du doigt 
l'apothicaire. 


Mais Binet, tout entier à la lecture de l'addition, 
n'avait rien entendu probablement. Enfin il sortit. 
Alors Emma, débarrassée, poussa un grand soupir.

Comme vous respirez fort ! dit madame 
Homais. 

Ah 
! c'est qu'il fait un peu chaud, répondit
-elle. 
Ils avisèrent donc, le lendemain, à organiser leurs 
rendez-vous ; Emma voulait corrompre sa servante 
par un cadeau 
; mais il eût mieux valu découvrir à 
Yonville qu
elque maison discrète. Rodolphe promit 
d'en chercher une. 
Pendant tout l'hiver, trois ou quatre fois la 
semaine, à la nuit noire, il arrivait dans le jardin. 
Emma, tout exprès, avait retiré la clef de la barrière, 
que Charles crut perdue. 
Pour l'avertir, Rodolphe jetait contre les 
persiennes une poignée de sable. Elle se levait en 
sursaut ; mais quelquefois il lui fallait attendre, car 
Charles avait la manie de bavarder au coin du feu, 
et il n'en finissait pas. Elle se dévorait d'impatience

si ses yeux l'avaient pu, ils l'eussent fait sauter par 
les fenêtres. Enfin, elle commençait sa toilette de 
nuit 
; puis, elle prenait un livre et continuait à lire 
fort tranquillement, comme si la lecture l'eût 
amusée. Mais Charles, qui était au lit, l'appelait pour 
se coucher. 

Viens donc, Emma, disait-il, il est temps. 

Oui, j'y vais 
! répondait
-elle. 
Cependant, comme les bougies l'éblouissaient, il 
se tournait vers le mur et s'endormait. Elle 
s'échappait en retenant son haleine, souriante, 
palpitante, déshabillée.


Rodolphe avait un grand manteau ; il l'en 
enveloppait tout entière, et, passant le bras autour 
de sa taille, il l'entraînait sans parler jusqu'au fond 
du jardin. 
C'était sous la tonnelle, sur ce même banc de 
bâtons pourris où autrefois Léon la regardait si 
amoureusement, durant les soirs d'été. Elle ne 
pensait guère à lui maintenant.
Les étoiles brillaient à travers les branches du 
jasmin sans feuilles. Ils entendaient derrière eux la 
rivière qui coulait, et, de temps à autre, sur la berge, 
le claquement des roseaux secs. Des massifs 
d'ombre, çà et là, se bombaient dans l'obscurité, et 
parfois, frissonnant tous d'un seul mouvement, ils se 
dressaient et se penchaient comme d'immenses 
vagues noires qui se fussent avancées pour les 
recouvrir. Le froid de la nuit 
les faisait s'étreindre 
davantage 
; les soupirs de leurs lèvres leur 
semblaient plus forts ; leurs yeux, qu'ils 
entrevoyaient à peine, leur paraissaient plus grands, 
et, au milieu du silence, il y avait des paroles dites 
tout bas qui tombaient sur leur âm
e avec une 
sonorité cristalline et qui s'y répercutaient en 
vibrations multipliées.
Lorsque la nuit était pluvieuse, ils s'allaient 
réfugier dans le cabinet aux consultations, entre le 
hangar et l'écurie. Elle allumait un des flambeaux de 
la cuisine, qu'el
le avait caché derrière les livres. 
Rodolphe s'installait là comme chez lui. La vue de la 
bibliothèque et du bureau, de tout l'appartement 
enfin, excitait sa gaieté
; et il ne pouvait se retenir 
de faire sur Charles quantité de plaisanteries qui 
embarrassa
ient Emma. Elle eût désiré le voir plus 


sérieux, et même plus dramatique à l'occasion, 
comme cette fois où elle crut entendre dans l'allée 
un bruit de pas qui s'approchaient. 

On vient ! dit-elle. 
Il souffla la lumière.

As-tu tes pistolets ? 

Pourquoi ? 

Mais... pour te défendre, reprit Emma.

Est-ce de ton mari ? Ah 
! le pauvre garçon

Et Rodolphe acheva sa phrase avec un geste qui 
signifiait 
: «Je l'écraserais d'une chiquenaude.»
Elle fut ébahie de sa bravoure, bien qu'elle y sentît 
une sorte d'ind
élicatesse et de grossièreté naïve qui 
la scandalisa. 
Rodolphe réfléchit beaucoup à cette histoire de 
pistolets. Si elle avait parlé sérieusement, cela était 
fort ridicule, pensait-
il, odieux même, car il n'avait, 
lui, aucune raison de haïr ce bon Charles,
n'étant pas 
ce qui s'appelle dévoré de jalousie
; - 
et, à ce 
propos, Emma lui avait fait un grand serment qu'il 
ne trouvait pas non plus du meilleur goût.
D'ailleurs, elle devenait bien sentimentale. Il avait 
fallu échanger des miniatures, on s'était coupé des 
poignées de cheveux, et elle demandait à présent 
une bague, un véritable anneau de mariage, en 
signe d'alliance éternelle. Souvent elle lui parlait des 
cloches du soir ou des 

Download 1,94 Mb.

Do'stlaringiz bilan baham:
1   ...   49   50   51   52   53   54   55   56   ...   116




Ma'lumotlar bazasi mualliflik huquqi bilan himoyalangan ©hozir.org 2024
ma'muriyatiga murojaat qiling

kiriting | ro'yxatdan o'tish
    Bosh sahifa
юртда тантана
Боғда битган
Бугун юртда
Эшитганлар жилманглар
Эшитмадим деманглар
битган бодомлар
Yangiariq tumani
qitish marakazi
Raqamli texnologiyalar
ilishida muhokamadan
tasdiqqa tavsiya
tavsiya etilgan
iqtisodiyot kafedrasi
steiermarkischen landesregierung
asarlaringizni yuboring
o'zingizning asarlaringizni
Iltimos faqat
faqat o'zingizning
steierm rkischen
landesregierung fachabteilung
rkischen landesregierung
hamshira loyihasi
loyihasi mavsum
faolyatining oqibatlari
asosiy adabiyotlar
fakulteti ahborot
ahborot havfsizligi
havfsizligi kafedrasi
fanidan bo’yicha
fakulteti iqtisodiyot
boshqaruv fakulteti
chiqarishda boshqaruv
ishlab chiqarishda
iqtisodiyot fakultet
multiservis tarmoqlari
fanidan asosiy
Uzbek fanidan
mavzulari potok
asosidagi multiservis
'aliyyil a'ziym
billahil 'aliyyil
illaa billahil
quvvata illaa
falah' deganida
Kompyuter savodxonligi
bo’yicha mustaqil
'alal falah'
Hayya 'alal
'alas soloh
Hayya 'alas
mavsum boyicha


yuklab olish