La vie des paysans du Massif Central
Duré à la tâche, toujours de bonne humeur, Sidonie faisait l’étonnement d’Irène. Le
matin, c’est elle qui se levait la première dès avant le jour. Elle ouvrait les portes, allait chercher
un fagot de bois sec sous le hangar, allumait le feu dans la grande cheminée.
Dès que son bois flambait, il fallait courir à la fontaine prendre son seau d’eau, remplir
la grosse marmite, la soulever à deux bras pour l’accrocher à la crémaillère. Entre-temps, les
hommes s’étaient levés. Pendant qu’ils faisaient la tournée des étables, Sidonie tout en balayant
sa cuisine s’occupait de leur faire le café. Après quoi, elle allait ouvrir les bêtes, donner le grain
aux poules, l’herbe aux lapins et s’en revenait préparer la soupe pour les chiens.
Elle n’avait pas toujours le temps de faire sa toilette avant le déjeuner du matin, car il lui
fallait encore laver la vaisselle du soir, aérer les chambres, faire les lits … . Les hommes
s’asseyaient autour de la grande table de cuisine et se contentaient de poser sur la toile cirée un
pot de vin et la tourte de pain.
“Qu’est-ce que tu nous donnes aujourd’hui?” Elle faisait l’inspection des placards, et
tâchait de les satisfaire. Lorsqu’ils partaient aux champs, il lui restait toujours quelque chose à
faire … . Elle allait les réjoindre aussitôt que possible et n’avait pas besoin qu’on lui donne du
travail. Hormis la charrue, elle maniait tous les outils et plus souvent encore usait ses mains à
arracher les herbes, attacher les vignes ou faire des fagots. Elle les quittait avant midi pour
préparer la soupe et le repas. Elle mettait le couvert, desservait la table, lavait la vaisselle,
occupait quelquefois l’heure de la sieste à faire sécher son linge.
L’après-midi, cela recommençait et le soir, elle se couchait la dernière. C’était ainsi toute
l’année car même les jours de pluie ou l’hiver, Sidonie avait toujours de l’ouvrage en retard, que
ce soit une étable à nettoyer ou le pantalon de son homme à rapiécer. Ses loisirs étaient ceux du
samedi matin; elle les passait au marché pour vendre quelques douzaines d’oeufs ou un panier
de fruits.
A la saison, elle aimait courir les bois pour ramasser les cepes, elle en faisait ensuite des
conserves ou les vendait à la ville.
Quelquefois, le dimanche, alors que, les hommes, après un bon repas, étaient partis pour
la chasse, elle s’asseyait enfin devant la porte. Elle bavardait un peu avec une voisine ou tricotait
pour son Milou qui allait être un soldat, un beau chandail de laine.
Sidonie avait accueilli avec joie l’arrivée d’Irène et de Louis, car leur présence
constituait une rupture avec tout ce que sa vie pouvait avoir de monotone. Louis lui apportait du
bois, de l’eau et la faisait rire aux larmes en esseyant de parler le patois. Irène l’aidait à la
vaisselle, mettait le couvert aux heures de repas et apportait tant de soin à faire le ménage de sa
chambre qu’on ne la reconnaissait plus.
“Nous n’allons plus y coucher”, disait la paysanne car elle et Roger leur avaient
abandonné la seule pièce convenable pour s’en aller dormir au-dessus de la cuisine, dans un
local qui servait à la fois de chambre et de grenier.
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