La guerre des ego
De manière générale, il n’y a pas de standards. Évidemment, quand je dis
ça, on me donne des exemples censés contredire ma théorie. Les prises
électriques, c’est bien un standard, non ? Oui, c’est vrai, mais
malheureusement, c’est faux. Pourquoi ? Parce si je traverse la Manche, nos
prises continentales ne rentrent pas dans les trous anglais, et que si je traverse
l’Atlantique jusqu’aux États-Unis, non seulement les prises ne rentrent pas,
mais en plus ils utilisent du 110 volts au lieu du 220… Les gens pensent
toujours qu’il y a des standards, mais c’est une vaste fumisterie. Nous avons
des standards locaux, mais pas de standards globaux, universels. Le premier
problème avec les standards vient des groupes de standardisation, qui
prennent énormément de temps pour se mettre d’accord, et le temps que le
« standard » sorte, il est souvent obsolète. On voit ça avec les ports USB par
exemple, à peine un format vient-il d’être validé qu’un autre bien plus
pratique est déjà en production… Certains considèrent également que les
standards sont des freins à l’innovation. Combien de fois Apple a-t-il fait
cavalier seul sur ses connecteurs pour nous fournir des solutions innovantes ?
Pire encore, prenons l’exemple de DLNA, originalement appelé UPnP pour
« Universal Plug and Play ». L’idée de base, excellente, était de créer un
standard pour que tous les appareils numériques puissent produire et lire tous
les flux média, photo, audio et vidéo, permettant leur libre circulation, de
l’ordinateur au téléphone, du téléphone à la télévision, etc. Dès le début des
années 2000, les Microsoft, Sony et autres gros et petits de l’électronique ont
organisé des réunions et se sont concertés pour développer ce standard.
Comme ces comités de standardisation mettaient un temps fou à s’organiser,
non seulement la technologie continuait à se développer, posant un risque
pour le standard lui-même, mais de surcroît, chaque entreprise a voulu
rajouter aux spécifications communes, son petit plus, chacune de son côté. On
s’est donc retrouvé dix ans plus tard avec un « standard » DLNA, qui n’était
plus du tout un standard car il y avait sept implémentations différentes. Au
lieu de travailler ensemble en allant dans la même direction, ce qui était
l’objectif initial, les entreprises se sont « tirées la bourre » pour pondre
chacune leur truc, en torpillant ce pour quoi elles s’étaient réunies.
Malheureusement, des exemples comme celui-là, il y en a beaucoup d’autres,
et ça confirme qu’en fait de standards, il y a surtout des ego…
Le monde de l’IA n’échappe pas à ce problème d’ego. Alors que Facebook
a mis sur pied avec Amazon et Microsoft un système appelé ONNX (Open
Neural Network Exchange), auquel beaucoup de monde s’est rallié, Google et
bien sûr Apple font cavaliers seuls. Du côté des plateformes de logiciels
« open source », là encore on retrouve Google (TensorFlow) et Facebook
(PyTorch) ainsi qu’une multitude d’autres projets. Dans le domaine particulier
des assistant vocaux, Amazon et Microsoft ont récemment décidé de créer
une plateforme commune pour pouvoir échanger des données, mais ces
initiatives commerciales ponctuelles ne vont pas dans le sens d’une
collaboration universelle permettant l’interopérabilité de tous les objets et
services.
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