Idiocracy
, sorti en France en 2007, raconte l’histoire de Joe
Bowers, un Américain moyen choisi par le Pentagone comme cobaye d’un
programme d’hibernation qui va mal tourner. Il se réveille 500 ans plus tard et
découvre que le niveau intellectuel de l’espèce humaine a radicalement baissé
et qu’il est l’homme le plus brillant sur la planète… Ce film parle de gens
devenus complètement crétins parce que deux ou trois personnes leur ont fait
croire n’importe quoi et ont profité de leur asservissement. Évitons d’accepter
l’ère de l’idiocracy technologique, et de laisser quelques types en mal de
publicité ou en proie à des problèmes existentiels nous dominer avec leur
idéologie de Frankenstein pour geeks.
L’une des craintes que les gens ont à propos de l’IA, est qu’elle soit utilisée
par des dictateurs pour nous soumettre. Qu’ils cherchent à augmenter l’être
humain de manière artificielle, dans le but d’acquérir plus de pouvoir.
L’histoire de l’humanité est jonchée de tyrans assoiffés de puissance qui, bien
avant l’émergence de la technologie, ont utilisé tous les moyens à leur
disposition pour asservir leurs populations. Il n’y a là rien de nouveau. Si la
technologie peut être un outil potentiellement dangereux entre leurs mains,
elle nous permet d’être mieux informés et plus conscients des enjeux et des
dangers qui nous guettent. Il devient du coup beaucoup plus difficile pour un
dictateur de dissimuler ses agissements, précisément parce que la technologie
a rapetissé le monde et que les informations circulent à une vitesse jamais vue
auparavant.
Une « intelligence artificielle » générique qui surpasserait ou même juste
imiterait toutes les capacités d’un être humain ne peut être développée en
utilisant les techniques mathématiques et statistiques que nous avons utilisées
ces soixante dernières années. Si je ne peux exclure qu’elle existera un jour, je
pense qu’elle nécessitera un changement d’approche tel, fondé sans doute sur
un mélange de sciences bien différentes telles que la biologie, la chimie ou
encore la physique quantique, qu’il n’y a guère de chances de la voir émerger
avant plusieurs centaines d’années. C’est pour cela que je souhaite qu’on
change le terme « intelligence artificielle » en « intelligence augmentée », et
qu’on cesse d’employer ce mot « artificielle », qui cristallise toutes les peurs
et qui est trompeur et mensonger. Outre le fait qu’il n’est pas besoin de
changer l’acronyme « IA », je suis très à l’aise avec l’appellation
« intelligence augmentée », parce qu’elle exprime bien mieux qu’intelligence
artificielle le fait qu’elle soit conçue pour améliorer notre intelligence plutôt
que pour la remplacer.
Aujourd’hui, le grand public a des craintes irréalistes au sujet de
l’intelligence artificielle, et des attentes improbables quant à la façon dont elle
changera leur vie. Chacun de nous doit comprendre que l’intelligence
augmentée améliorera simplement les produits et les services, mais ne
remplacera en aucun cas les humains qui les utilisent. Un programme d’IA
sophistiqué peut prendre une décision après avoir analysé des données, mais
son choix sera fonction de la base de données sur laquelle nous aurons choisi
de fonder le système. Le choix de cette appellation nous permet vraiment de
comprendre qu’il s’agit de renforcer notre propre intelligence et nos propres
capacités dans des domaines spécifiques. Mais nous garderons bien sûr le
contrôle, car nous, humains, avons de l’empathie, de la sensibilité et un sens
commun. La machine ne décide pas, c’est l’être humain qui prend les
décisions, grâce à son intelligence, amplifiée par la technologie. Elle devient
alors une aide pour toutes nos activités humaines.
Je ne crois pas aux méchants robots, en revanche, j’ai peur que les
méthodes courantes de Machine ou Deep Learning liées au big data nous
amènent à consommer beaucoup trop de ressources et se révèlent très
dangereuses pour la planète. Le volume de données est corrélé à celui
d’énergie nécessaire pour faire tourner et refroidir les data centers de plus en
plus larges et puissants où elles transitent et où elles sont traitées. On estime
qu’un grand data center peut consommer à lui seul plus qu’une ville française
de 100 000 habitants. La solution de facilité est de multiplier le nombre de
services sur le cloud qui semble avoir des capacités de calcul et de stockage
infini, puisqu’il suffit de construire de nouveaux data centers. Leur
multiplication, comportant des milliers de serveurs, pose donc un problème de
consommation d’énergie, puisqu’elle ne cesse d’augmenter. En 2015, celle-ci
représentait 4 % de la consommation énergétique mondiale. La climatisation
et les systèmes de refroidissement des data centers représentent de 40 à 50 %
de leur consommation énergétique. Les data centers américains ont
consommé 91 milliards de kWh en 2013 et 56 milliards en Europe. On
prévoit qu’ils consommeront 104 milliards de kWh en 2020. Près de
Washington, il y a même des centrales nucléaires dédiées à l’alimentation des
data centers. Répartis partout sur la planète, le problème du refroidissement
est encore plus sérieux dans les pays chauds. C’est pour ça qu’on voit des data
centers fleurir dans des endroits comme l’Islande, où l’énergie est produite à
moindre coup et où le climat permet de refroidir les serveurs plus facilement.
Mais tous les serveurs du monde ne pourront pas être accueillis en Islande !
On estime qu’un internaute moyen consomme 365 kWh d’électricité pour son
activité en ligne et utilise 2 900 litres d’eau par an. Pour vous donner une
idée, ça équivaut à la consommation annuelle électrique de 10 Haïtiens, et
assez d’eau pour survivre pendant deux ans et demi… Le selfie, qui semble
anodin en apparence, est en réalité un gouffre énergétique et écologique :
chaque photo que vous prenez et que vous postez sur votre mur Facebook est
envoyée à travers des dizaines de milliers de kilomètres de fibres et de câbles,
et transite par des équipements réseaux jusqu’aux data centers de Facebook.
Pour vous donner une petite idée, cette simple photo de vous consomme à elle
seule autant que 3 ou 4 ampoules basse consommation de 20 watts allumées
pendant une heure ! Sans compter qu’il faut ensuite la stocker sur les serveurs
et bien les refroidir… Quand on sait qu’il y a 2 milliards d’abonnés Facebook
qui postent plusieurs photos par jour, combien de data centers va-t-il falloir
construire et alimenter dans les années qui viennent pour pouvoir stocker
leurs données ? Si Internet était un pays, il serait le 3
e
plus gros
consommateur d’électricité au monde avec 1500 TWh par an, derrière la
Chine et les États-Unis. Toutes les études arrivent à la même conclusion :
autour de 2020, l’économie digitale, qui regroupe Internet, les terminaux, les
réseaux, les cryptomonnaies, la technologie
Do'stlaringiz bilan baham: |